De 2007 à 2019, quarante-sept mille femmes des Balkans ont migré vers le Levant espagnol pour le travail du sexe. À partir de 2013, dix-sept mille d'entre elles sont revenues dans leur pays d'origine avec un capital global de 6,8?milliards d'euros?: soit, compte tenu des valeurs d'usage, une capacité d'investissement de 20,4?milliards d'euros, ensuite engagés dans des projets d'hôtellerie, de tourisme, de commerces, dans l'agriculture... À travers les témoignages de plusieurs de ces femmes, cet ouvrage décrit la diversité de leurs parcours et de leurs trajectoires de retour après cinq à sept années de travail. Ces profils croisent les recherches menées par l'auteur depuis 1987 sur la construction de réseaux de circulation et de commerce «?entre pauvres?», dits «?poor to poor?», dans l'espace euroméditerranéen. Partant de leurs récits, ces trajectoires révèlent, à l'aller, la présence de formations criminelles et mafieuses, et, au retour, le renversement des dominations pour nombre de ces femmes, «?qui n'auraient jamais connu de promotion sociale en restant au pays?». Économies paradoxales, immorales??Alain Tarrius est professeur émérite de l'université Toulouse II-Jean-Jaurès.Il a écrit ce livre avec le concours de Lamia Missaoui, professeure, université Saint-Quentin-en-Yvelines, et Dominique Sistach, maître de conférences, université de Perpignan.
Des cohortes de migrants internationaux Afghans passent par les ports turcs et géorgiens de la Mer Noire : là ils se chargent de produits électroniques du Sud Est asiatique transitant par Dubaï et Koweït City. Totalement détaxés ils sont livrés en Bulgarie, c'est-à-dire dans la Communauté Européenne, à 40% de leur prix de vente européen. Environ six milliards de dollars de marchandises franchissent ainsi délictueusement nos frontières grâce à des migrants qui n ont rien à voir avec les Afghans misérables de la jungle de Calais. Les régulations des échanges bancaires liées à la Crise interdisent désormais à ces migrants, auxiliaires des stratégies commerciales du « poor to poor », « l entre pauvres » des grandes firmes, de bénéficier de lignes internationales de crédit -40% du montant des achats- que des banques émirates leur consentaient. Alors les réseaux criminels suppléent à cette « moralisation » des circulations de capitaux en offrant des sommes équivalentes d argent à blanchir et, en contrepartie, exigent des Afghans qu ils cultivent, pendant leurs migrations, le pavot à opium en Turquie et en Géorgie. En somme des dizaines de milliers d Afghans, accompagnés de Kurdes, d Irakiens et d Iraniens participent désormais aux activités des réseaux criminels et y associent de fait des grandes firmes de l électronique asiatique. Ces nouvelles accointances, étendues aux populations balkaniques, fournissent une main d uvre afghane et albanaise aux entreprises sud italiennes pratiquant le blanchiment du même argent sale. Ce phénomène est accompagné d une dynamisation des activités prostitutionnelles des réseaux criminels des Balkans, du Caucase et du pourtour méditerranéen vers les « clubs » du Levant espagnol, via Naples, Bari, Brindisi. De la Junquera à Malaga, la passe se négocie désormais avec une dose de cocaïne. La Junquera lieu d entrée privilégié associe aux revenus de ces activités les notables de part et d autre de la frontière et surtout de Perpignan. En fait nous assistons à une réorganisation des réseaux criminels sur le modèle de la « toile » internet, c'est-à-dire mondialisés, polyvalents, complémentaires. Un nouvel ordre criminel mondial se déploie sans contrôle, alors que les Etats peinent à définir leur place dans cette insaisissable mondialisation. Les chercheurs, anthropologues et sociologues, nous font vivre de l intérieur ces transformations au plus près des terrains qu ils explorent depuis des années.
Chaque année plus nombreux, des étrangers de passage, des migrants, se mêlent aux habitants de quartiers pauvres de nos villes. Ils circulent avec des titres de tourisme. Dans cette course sans fi n, ils font des commerces les plus divers. Toujours à bas prix, qu'ils vendent aux pauvres des quartiers pauvres. Cette mondialisation du poor to poor , pour les pauvres par les pauvres, est une extraordinaire soupape d'économie parallèle trop souvent inconnue. Surtout elle induit des mutations identitaires car elle structure des appartenances souvent communautaires, ethniques, religieuses, passant de communautés immigrées en communautés immigrées. En réalité ces formes de commerce en marge réalisent le rêve des plus riches d'un commerce sans frontière...
Des millions de gens circulent avec des titres touristiques pour e ectuer un moment leurs activités criminelles d'un pays à l'autre. Prostituées saisonnières suivant les fl ux touristiques ou échangeant « leurs » places de capitales en capitales, marché de la coke ou trafi cs les plus divers souvent concentrés le long des frontières pour mieux échapper aux contrôles. Ce livre mêle une analyse globale à des rencontres particulières ou à des analyses de situations comme celle d'Andorre. Une plongée vertigineuse dans les formes criminelles de la mondialisation qui rappelle étrangement le Paris de Hugo ou de Zola, mais à une autre échelle et une autre puissance...
Perpignan, ville moyenne, expose dans ses rues et ses quartiers beaucoup de frontalité, de l'affrontement même, entre territoires bourgeois, étendues pavillonnaires, zones de confinement de tous ceux qui sont désignés comme étrangers.
C'est à dire les arabes, étrangers de " l'extérieur ", les gitans, étrangers de " l'intérieur " ; les sans logis et routards, les néo-ruraux pauvres repoussés dans la désignation de " marginaux " et enfin ceux, produits de plus en plus massivement comme étrangers aux destinées que la république prétend encore réserver à ses enfants, les jeunes " à la rue " sans formation ni espoir.
Et voici que dans ce perpignan de la régression en spirale, des records nationaux du chômage, des maladies infectieuses, du rmi, ces populations font " milieu ", prennent des initiatives collectives qui les fédèrent dans un ailleurs des discours et projets politiques.
La pauvreté devient un mode de développement attractif et socialement innovateur ; elle fait ici centralité bien au-delà des limites de la ville, de son département, de sa région ; elle pourrait bientôt enfanter une forme originale du pouvoir des " exclus " sur la ville, dont nul aujourd'hui ne peut décrire les contours. trois recherches, menées de perpignan à barcelone, nourrissent cette réflexion la crise de la communauté gitane catalane à partir des commerces et usages de l'héroïne, et les perspectives de résolution que suggèrent les " femmes en noir " ; le développement des initiatives des maghrébins dans les économies souterraines transfrontalières ; la renaissance de l'espace public de la ville à partir des comportements collectifs des jeunes laissés pour compte du développement.
L'avenir de perpignan est bien incertain : il a peut-être pour rôle historique de tracer les voies du devenir démocratique de tous, de toutes les villes de france.
Entre Amérique Latine et Etats-Unis, entre sud et nord de la Méditerranée, entre diverses régions pauvres et riches d'Asie se développent de nouvelles migrations transnationales. L'auteur a accompagné des migrants afghans et syriens tout au long de leur cheminement dans les Balkans, ainsi que des Marocains durant leurs nombreux allers-retours commerciaux entre le Midi de la France, le Levant espagnol et le Maroc.
Requis par des firmes du Sud-Est asiatique, des centaines de milliers de Marocains, d'Afghans, de Syriens, de Caucasiens commercialisent vers les populations européennes pauvres, hors règles internationales, divers produits sans se fixer dans les nations traversées. Ce nouveau type de migration lié à la mondialisation se substitue à la forme classique des migrations nationales pour le travail. L'autonomie que confèrent ces activités aux groupes de nouveaux migrants est dévastatrice pour les politiques d'intégration des migrants des Etats européens. Les modèles politiques avancés sont historiquement dépassés et condamnent à l'inefficacité les projets de gestion des flux
migratoires. A partir d'enquêtes de terrain, l'auteur montre comment des grandes villes sont transformées par ces populations qui ne résident plus dans les quartiers de la pauvreté mais qui contribuent aux dynamiques les plus affirmées de rénovation de quartiers centraux à Sofia, à Trieste, à Alicante par exemple. Ces approches lui permettent de revisiter les principales théories du développement urbain, et de proposer des adaptations liées aux contextes de la mondialisation.
Depuis 2007, 47 000 femmes issues des Balkans sont allées en Espagne, pour des "séjours" en clubs de prostitution. "Séjours", car souvent, elles faisaient ensuite le chemin en sens inverse, et revenaient investir dans leurs pays et y fonder des entreprises.
Malheureusement, la guerre est venue tout balayer.
Contrairement à ce que l'on aurait pu penser, la mafia russo-ukrainienne dite « du Dniepr » s'est renforcée, et l'immense majorité de ces femmes n'a pas eu d'autre choix que de se disperser dans toute l'Europe, et bien souvent de revenir travailler dans le domaine de la prostitution. Dans cet ouvrage, l'anthropologue Alain Tarrius nous raconte le parcours de ces femmes, et le cynisme jamais démenti de ces hommes qui, en toutes circonstances, tirent leur épingle du jeu
De l'an mille à nos jours des femmes sont « importées » du pourtour méditerranéen et des Balkans à Perpignan et ses territoires. Des religieuses, des Saintes, des Comtesses et des Reines, des femmes esclaves, échangées contre du safran, des étoffes, ont nourri ces cosmopolitismes tout au long de ce dernier millénaire, relayées depuis deux décennies par plus de 40 000 prostituées des mêmes origines sous l'emprise des mafias russo-ukrainienne et italiennes. Ces récentes implantations contribuent à l'apparition de prostitutions chez les adolescent-e-s perpignanais-e-s les plus fragiles, sous l'omerta des médias et des instances politiques départementales. Ces derniers phénomènes sont contemporains d'une redéfinition des rôles féminins internes à la grande Catalogne d'Espagne aux rapports de genre encore marqués par un patriarcat post-franquiste. Plus particulièrement ce combat est mené par des femmes andorranes, hors autorité des pouvoirs catalans et espagnols.
Ce livre est un dialogue entre Jean-Paul Alduy, sénateur-maire de Perpignan, ville des records nationaux de pauvreté, de chômage, de criminalité, de diversités culturelles, et le sociologue Alain Tarrius, qui étudie les formes et destinées de la mosaïque cosmopolite de cette ville. La ville de Perpignan est abordée sous toutes ses coutures, "par le haut" (réseaux culturels mondialisés, développement culturel, transformations urbaines...) et "par le bas" (économies souterraines, trafics de drogues...) Un livre passionnant pour comprendre les enjeux de cette ville du Sud, mais aussi pour s'interroger de façon plus large sur l'ensemble des sujets évoqués et leur impact sur un certain nombre de communes européennes.